Le 25 octobre dernier, Melody Gardot sortait un nouvel album, "The Essentiel Melody Gardot", un opus sous forme de compilation des plus grands titres de l'artiste américaine, pour ses (presque) 20 ans de carrière. A l'occasion, Jazz Radio a eu l'occasion de se rendre à Paris pour échanger avec la chanteuse. Au micro de Benoit Thuret, Melody Gardot s'est confiée sur la façon dont elle a préparé cet album, sur sa relation avec la France et sur sa future résidence à l'Olympia.
"Une gastronomie musicale", ou comment Melody Gardot a construit son "Essentiel"
Pour Melody Gardot, ce nouvel album est une belle façon de compiler le meilleur de sa carrière, même si faire une sélection de chansons cela s'apparente à "choisir entre (ses) enfants", mais surtout une occasion unique de faire découvrir son univers à des gens qui pourraient ne pas connaître son travail, elle qui a elle même découvert des artistes grâce à des albums best of.
Grâce à cette compilation, Melody Gardot peut autant mettre en avant un album très "politique", comme "Currency of Man", où l'artiste dépeint les "gros problèmes de racisme, d'injustice" dans son pays, les Etats-Unis, que "My one and only thrill", un opus bien plus "romantique et innocent" ou même des titres inédits, notamment avec le contrebassiste Charlie Haden, ou sa reprise du célèbre morceau espagnol "La Llorona" de Chavela Vargas. Autant de mélanges de genres et de sonorités, qu'elle résume en une "grande gastronomie de musique".
La recherche d'une esthétique, une quête de "sens" pour Melody Gardot
Il suffit de regarder les affiches, les photos promotionnelles et les pochettes d'albums de Melody Gardot pour comprendre que l'esthétisme est une notion très importante chez elle. Un sens du détail que la musicienne explore avec beaucoup de conviction depuis la pochette de son album live "Live in Europe", où on la voit dans une photo en noir et blanc, nue et de dos sur scène, une image qui résonne encore en elle aujourd'hui.
"J'adore cet album. J'adore la métaphore de cette image. (...) Le but, c'était la métaphore et les gens qui sont un peu cons, ignorants, (qui sont) prêts à juger une femme. (...) Cet album, ce moment, était quelque chose de sacrément fort, parce que métaphoriquement, j'étais handicapée pendant longtemps, chaise roulante, canne (...) Mais le fait que 15 ans plus tard, je me trouve début, sans canne et avec le micro pour me stabiliser, j'ai décidé de faire cette photo et je l'ai défendue parce que c'est vraiment le visuel de la métaphore de ce que j'ai vécu. D'abord, grâce à vous, je suis débout. Et deuxièmement, j'ai rien à cacher." - Melody Gardot
La passion de Melody Gardot en France ? "Moi, j'adore manger, j'adore manger !"
Et quand on demande à Melody Gardot ce qu'elle préfère chez nous, sa réponse se montre très enthousiaste.
"C'est la gastronomie. Vous avez la meilleure gastronomie dans le monde entier" - Melody Gardot
Une déclaration d'amour passionnée, liée aussi au passé de la musicienne, qui a connu des périodes de pauvreté.
"On était méga pauvres. Alors, j'ai jamais connu le bonheur de la nourriture. Et d'ailleurs, autour de 13 ou 14 ans, tout ce qu'on a eu était si horrible que j'ai préféré être vegan parce que l'accès de la viande était trop cher. Alors, on a eu juste accès à quelque chose qui n'était pas très bien, qui était déjà presque passé. (...) Mais il y a tellement de choses qui vous avez ici pour découvrir en France." - Melody Gardot
Outre la nourriture, Melody Gardot reconnaît une belle qualité à la France : une créativité sans borne, où "on peut continuer à créer sans limites". De plus, l'artiste admire notre capacité à continuer de rendre hommage à nos musiciens, qu'ils soient morts ou vivants, tel un fier patrimoine.
"Franchement l'amour que vous avez pour le jazz en France, est cohérent et concurrent avec ce qui se passe aux Etats-Unis. Mais moi, personnellement, je trouve que vous avez quelque chose qu'on a pas là-bas (...), qui est le respect et le legacy qui continuent avec une puissance pour même les artistes qui sont plus avec nous" - Melody Gardot