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Guillaume BELHOMME : Way Ahead ; jazz en cent autres figures.

Guillaume BELHOMME : Way Ahead ; jazz en cent autres figures. Collection Formes, éditions Le Mot et le Reste. Préface de Ken Vandermark.

Après avoir décliné dans Giant Steps cent figures emblématiques du jazz, en avoir dessiné le portrait musical et présenté cinq cents chroniques de disques, Guillaume Belhomme récidive avec Way Ahead. Cent artistes et leurs disques considérés comme les meilleurs, ou tout au moins représentatifs de leur art, sont donc mis en avant dans une présentation sobre, claire, simple, dénuée de ce verbiage amphigourique trop souvent usité par des chroniqueurs dans leurs notules absconses.

Parmi ces artistes, quelques-uns ne sont pas inconnus des amateurs de jazz et je pourrais citer par ordre alphabétique : Carla Bley, Kenny Burrell, Don Byas, Benny Carter, Kenny Clarke, Art Farmer, Paul Gonsalves, Oscar Petitford, Pee Wee Russel ou encore Zoot Sims. Certains d’entre eux doivent leur célébrité non pour leurs enregistrements en solo mais parce qu’ils ont été des membres quasiment indispensables de nombre d’orchestres et d’ensembles de renom. Paul Gonsalves fait partie de ces instrumentistes et il écuma les formations de Count Basie, où il s’ennuya, et celle de Duke Ellington où il effectua la plus grande partie de sa carrière, en passant par celles de Dizzy Gillespie et Tommy Dorsey. D’autres noms ne me disaient absolument rien avant d’ouvrir l’ouvrage, mais en y regardant plus près, en détaillant leurs fiches, je me suis rendu compte que s’ils avaient eu, et ont encore pour certains, une discographie propre, souvent ils avaient joué avec des interprètes prestigieux. Prenons l’exemple d’Eddie « Lockjaw » Davis (1922-1986). Edward Davis apprend le saxophone en autodidacte prenant pour modèle des saxophonistes comme Coleman Hawkins, Ben Webster ou encore Don Byas et dès 1942 il intègre différents orchestres dont celui de Louis Armstrong. Après une association avec Fats Navarro puis Sonny Stitt, il rejoint dans les années 1952-1953 l’ensemble dirigé par Count Basie. Enfin, fin 1960, il rejoint Johnny Griffin. Je clos là la fiche sur Eddie « Lockjaw » Davis, car il faut également laisser au lecteur le plaisir de la découverte. Je peux toutefois ajouter que cinq disques sont passés à la moulinette dont Eddie « Lockjaw » Davis 1946-1947 dans la collection Classics, reproduction de la pochette du CD à l’appui. Dans ce CD figurent quelques unes de ses compositions personnelles et des reprises de standard, avec pour partenaires le trompettiste Fats Navarro et le pianiste Al Haig. Et pour tous les interprètes cités dans cet ouvrage, il en va de même. Je pourrais citer en vrac Elmo Hope dont j’ai découvert le nom mais qui a joué avec les saxophonistes John Coltrane et Hank Mobley ou encore avec le trompettiste Donald Byrd ; Muhal Richard Abrams, pianiste qui a joué dans les années 1950 aux côtés de Max Roach, le batteur ou Dexter Gordon, saxophoniste que j’avais découvert grâce au film de Bertrand Tavernier Autour de minuit ; ou encore Roswell Rudd, John Tchicai, Han Bennink, Paul Dunmall, Ran Blake… Mais le jazz est multiple, et ses interprètes aussi. Et évidemment lorsqu’on a des préférences, comme moi qui écoute plus volontiers le New Orléans ou encore le jazz qui s’exprimait jusque dans le milieu des années 1950, le jazz de papa comme on pourrait le définir, il est inévitable de posséder des lacunes concernant les instrumentistes du free jazz ou du jazz actuel, sauf quelques têtes d’affiche. Mais cela m’incite à me replonger dans ma discothèque afin de m’intéresser un peu plus en profondeur aux divers intervenants, qui parfois changeaient souvent de « patron », dans les orchestres et formations comme celle de Duke Ellington qui traversa les périodes et souvent explora de nouvelles formes musicales, de Lionel Hampton, de Charlie Mingus, de Gerry Mulligan, de Charlie Parker, de Thelonious Monk, d’Earl Hines et combien d’autres à découvrir. Tous noms connus, mais dont on serait bien en peine, sauf spécialistes bien évidemment, de citer les accompagnateurs. Il ne s’agit pas véritablement d’un dictionnaire ni d’un catalogue, mais un peu le mélange des deux, amélioré, qui permet au lecteur de connaitre un peu mieux les musiciens de jazz, de les découvrir et de se monter une discothèque quasi idéale. Et de s’approprier les noms des divers instrumentistes qui sillonnent la planète Jazz, tout du moins une partie. Pas pour épater la galerie, mais pour son petit plaisir personnel, pour son confort d’écoute, pour ne pas rester ignare dans une conversation, même si vous ne vous mêler pas à la discussion, mais pour se dire in petto, celui je le connais, celui là aussi. Sans étaler ses connaissances mais sans être submergé non plus par celles de ceux qui les étalent volontiers. Un ouvrage précieux à compulser souvent, au moins lorsque vous écoutez un CD, ou pour les veinards qui les possèdent des vinyles, à la condition express que les noms de tous les artistes soient déclinés sur les pochettes. Un minimum de respect que devraient aborder toutes les maisons de disques et celles qui rééditent sans vergogne, omettant les intervenants, les dates de prise de son et autres babioles qui font le bonheur des discophiles et mélomanes. Et comme à part celle écrite à propos de Jean-Luc Guyonnet, aucune fiche n’est consacrée à des musiciens français, j’espère que Guillaume Belhomme réparera cette carence dans un prochain ouvrage.

Paul Maugendre.