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Régis CANSELIER : Jimi Hendrix, le rêve inachevé.

Collection Formes ; Editions Le Mot et le Reste.

L’image qui restera à jamais attachée à Jimi Hendrix, ce sera celle d’un musicien jouant de la guitare avec ses dents. Image réductrice mais oh combien prégnante, parmi d’autres. Si l’ouvrage de Stéphane Koechlin Blues pour Jimi Hendrix narrait la vie de l’artiste en parallèle de celle de son fan Yazid Manou, Régis Canselier nous invite à mieux découvrir l’œuvre de ce musicien à travers des enregistrements d’époque et ceux qui en sont le prolongement parfois anarchique. Le lecteur ne doit pas s’attendre à lire une biographie voyeuriste sur la vie privée du musicien, mais il possèdera entre les mains un ouvrage sérieux, documenté, passionnant consacré à un phénomène musical dont les enregistrements du temps de son vivant sont relativement rares, tandis que son aura ne fléchissant pas les albums suivants font florès, pirates officiels ou non, remix de bouts de chandelles qui n’apportent rien aux exégètes et aux véritables fans. Régis Canselier débute son ouvrage par les trois singles londoniens, et la découverte de Jimi Hendrix par Linda Keith (mannequin anglais qui sortait alors avec Keith Richards des Rolling Stones) qui persuade Chas Chandler, qui jouait comme bassiste dans le groupe des Animals mais avait décidé de se tourner vers la production, d’aller écouter le guitariste. Chandler est séduit par le jeu de ce musicien alors que d’autres managers dont celui des Stones n’avaient pas été convaincus.

C’est ainsi que débute la carrière fulgurante et trop tôt interrompue de Jimi Hendrix.

Cet ouvrage ne s’adresse pas particulièrement à une élite de musicologues mais à tout amateur curieux, désireux de connaître les dessous d’une carrière avec tous les aléas qui en découlent, l’envers du décor de la scène, les séances d’enregistrements en studio, les concerts, les galères diverses qu’il faut surmonter, les vrais et les faux amis, la vie des disques après la mort de l’interprète, de l’artiste, le piratage autorisé et ceux qui sont édités dans la plus grande anarchie, les chacals qui se déchirent un héritage qu’ils se sont appropriés, les financiers qui ne pensent qu’à écouter le cri du dollar dans leur portefeuille.

Cet ouvrage fourmille de détails, d’exemples, de références, d’instants prélevés enchaînés comme un diaporama musical. L’œuvre de Jimi Hendrix est mise à nu, décortiquée, avec passion, sensibilité et rigueur. Ainsi penchons un peu sur la description de sa prestation télévisée du 4 janvier 1969 dans le cadre de l’émission « Happening for Lulu ». Il arrête l’interprétation de son premier morceau, Hey Joe, déclarant qu’il « aimerait arrêter de jouer cette merde et dédier cette chanson à Cream » groupe qui venait de se séparer officiellement. Mais c’est lors de l’interprétation du cinquième morceau Little Wing que se produit un léger incident qui a peut-être échappé à beaucoup d’auditeurs. Bien que sa Stratocaster soit légèrement désaccordée, Hendrix nous offre avec l’introduction de Little Wing un moment de pur lyrisme.

Jimi Hendrix, le rêve inachevé est donc accessible à tous ceux qui aiment la musique issue du blues, et point n’est besoin pour cela de connaître le solfège mais d’avoir l’oreille accueillante. Un vrai bonheur de lecture qui peut se faire accompagner par l’écoute de disques originaux ou des éditions ultérieures pirates, officielles, qui sont recensées en fin de volume. Sont recensées également une bibliographie, la liste des concerts, des setlists et figurent les reproductions en couleur des pochettes de disques, dans un cahier en fin d’ouvrage.

 

Paul Maugendre

 

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