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Philippe FEENY : Seine de crimes

Editions Krakoen

 

Alors que les Allemands s’approchent rapidement de la Normandie après avoir investit la Somme, en ce 27 mai 1940 l’inspecteur Kalouba, de la brigade criminelle de Rouen est envoyé enquêter sur le meurtre de la jeune femme du Principal d’un collège privé de Fécamp. Le corps de cette jeune enseignante des Beaux-Arts et de l’école de musique a été découvert étranglé dans son lit, le visage badigeonné d’une crème blanchâtre, la bouche barbouillé de rouge à lèvres, vêtue d’une simple nuisette et la toison pubienne recelant des traces de sperme. Une mise en scène pour le moins macabre.Le mari a disparu et à juste titre est soupçonné, mais lui aussi ne pourra plus nier ou avouer son crime. Son corps est retrouvé flottant près d’Etretat. Kalouba est rappelé à Rouen, d’autres tâches attendent les policiers et après quelques pérégrinations il va émigrer à Vichy, escortant la femme du Maréchal et jouant le rôle de chevalier servant.

En avril 1945 de retour au bercail, dans une ville de Rouen sinistrée par les bombardements d’avril 1944, il se voit confier un dossier qui n’est pas sans évoquer celui avorté de Fécamp. Une femme a été assassinée selon le même procédé que la jeune professeur de Fécamp. Même petite taille, même apparence, et même appartenance au milieu musical. Des points communs qui relient les deux affaires. Alors que Kaluba et son équipe entament leur enquête une nouvelle affaire leur tombe sur les bras. Un troisième cadavre de jeune femme est retrouvé dans les mêmes conditions et il leur faut rechercher les similitudes, les points communs,, les relations communes. D’autant qu’en extrapolant sur les années de guerre, ils supposent que d’autres disparitions mystérieuses n’auraient pas forcément été déclarées en leur temps, à cause de la débandade qui frappait la population.

 

En appliquant le petit jeu du pour et du contre, je relèverai pour le contre l’impression de déjà lu à moult reprises ce genre de scénario. Mais le final lui est trépidant et assez innovant. Toujours pour le pour j’avancerai comme bonne impression les phrases sculptées au rasoir, qui ne manquent pas parfois de poésie, les dialogues concis et percutants, la description historique brève et neutre de la guerre et du rôle des policiers durant la période de Vichy, et puis cette petit musique chaleureuse empreinte du jazz d’après guerre. D’ailleurs Kaluba, le narrateur déclare : Mon père raffolait de la musique russe : Moussorgski, Tchaïkovski, Borodine et Rimski, vous imaginez ! Shéhérazade, Le Prince Igor et Casse-noisette me cassaient les pieds ; il ne supportait qu’une exception : la mer de Debussy ; il nous lassait souvent et la commentait avec de terribles histoires de naufrage.

Il y a bien longtemps de cela ! Des goûts plus légers se sont emparés de mes sens : Ray Ventura, Charles Trenet, et de Trenet au jazz il n’y a qu’un pas que je franchis au milieu des années trente. Ça bougeait assez à l’époque : Django, Grapelli, Benny Goodman, et, lorsque je tombais par hasard  sur les enregistrements réalisés par le patron du Hot Club de France à La Nouvelle Orléans : Tommy Ladnier, Mezzrow, et à la suite, j’étais converti, mûr pour le Dixieland, les Lorientais, Claude Luter et Bechet. Seul petit bémol, Claude Luter et Les Lorientais n’ont commencé à jouer ensemble qu’en avril 1946 dans les caves de Saint-Germain des prés, et plus précisément dans celle du Lorientais d’où le nom de la formation. Drôlement fortiche l’inspecteur Kaluba, qui connaissait ce groupe en avril 1945. Mais ceci est une autre histoire. Seine de crimes reste une agréable balade dans les environs de Rouen.

 

Paul Maugendre.

 

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