Philippe Baute est directeur de l'office du tourisme d'Antibes-Juan-les-Pins. Mais c'est aussi l'organisateur du festival Jazz à Juan, un des plus anciens et des plus beaux festivals de France et en Europe, au minimum. C'est un rendez-vous incontournable tous les étés. Cela sera encore le cas en 2024, du 8 au 18 juillet 2024, une sorte de respiration dans un environnement difficile : "Il faut aborder ce festival comme un moment de bonheur que l'on s'accorde à écouter un artiste soit que l'on découvre, soit que l'on aime et pas autre chose".
Jazz à Juan, c'est un monument...
Pour mes équipes et moi, c'est vrai un honneur. On sait pertinemment qu'on est très privilégié de mettre en oeuvre chaque année ce festival qui est bien plus ancien que nous et qui perdurera bien longtemps après nous. Nous sommes là pour transmettre un merveilleux festival dans lequel on espère que les artistes et le public trouvent leur bonheur. Pour cela, nous avons un trio à la direction artistique composé de Jean-Noël Ginibre, Reno Di Matteo et Pascal Pilorget qui oeuvre au quotidien à veiller à la pérennité de ce festival, à rester enraciné dans l'histoire du jazz telle qu'elle nous a été communiquée par les programmations précédentes et à s'inscrire aussi dans un caractère plus contemporain et de diversité à l'attention de nouveaux publics.
Le jazz est là mais vous essayez aussi d'ouvrir le festival à un nouveau public ?
Oui, on veut montrer que le jazz est une musique pour tout le monde et aussi une musique de fête. On essaie de toucher des nouveaux publics, non seulement parce que le lieu est absolument hallucinant mais aussi avec la diversité des musiques que l'on va proposer. Par exemple, Avishai Cohen, qui nous fait de nombreux concerts purement jazzy, décide cette année de nous faire découvrir des musiques d'autres continents et on propose une soirée sud-américaine sur la base de son dernier album où on va retrouver des musiciens cubains. On va être dans une soirée un peu différente, mais là aussi, l'idée, c'est d'ouvrir les esprits, faire vibrer les oreilles de ceux qui viendront. On a réinstauré une soirée plutôt centrée sur l'Afrique que l'on n'avait pas faite depuis très longtemps avec Youssou N'Dour, un pilier historique de l'histoire de notre festival, sera là mais on ouvre aussi avec Tiken Jah Fakoly, dans un registre un peu différent, le mercredi 10 juillet.
La veille, vous recevez Toto. On imagine que les fans ont dû se battre pour les places ?
Il ne reste que quelques places debout. Les sièges se sont vendus comme des petits pains. C'est aussi un sacré souvenir pour moi. J'avais 16 ans, j'ai les albums en vinyle et quand il y a eu cette hypothèse, on est d'ailleurs là aussi sur de l'ouverture, on ne pouvait pas manquer cette occasion de proposer ça à notre public sachant qu'en plus, en première partie, on accueille un grand batteur en la personne de Manu Katché qui ouvrira notre 63e édition. Je pense qu'on est totalement dans un concert signature tel que sait le proposer Jazz à Juan.
Le 12, on s'attend à quelque chose de très festif avec les Pink Martini...
Ce sera une grande fête oui. On joue un petit peu le noble vintage et je dirais aux spectateurs de ne pas perdre de temps parce que c'est un immense succès. C'est aussi ce qui fait plaisir, c'est de voir que les gens adhèrent à la diversité de ce que l'on leur propose. C'est aussi certainement que cette programmation va dans le sens du temps.
Pour les fans de jazz et de piano, il faut aussi voir Brad Mehldau ?
Oui, il est largement dans le top 3 dans le monde en matière de clavier. On l'a eu en tête d'affiche l'année dernière et on reconnaît toute l'humilité des musiciens de jazz, il vient cette fois en quartet avec des musiciens qui sont également d'énormes noms. Pour les amateurs de jazz, quand on la chance d'avoir quatre gigantesques talents sur scène, pour une heure et demi, c'est vraiment une occasion à ne surtout pas manquer.
On peut dire ça pour toutes les soirées comme celle du lundi 15 juillet avec Sofiane Pamart ou Erik Truffaz ?
Oui, les places partent également vite. Les gens viennent voir Sofiane parce que c'est un artiste pas comme les autres dans la diversité musicale qu'il propose. Il fait partie de ceux qui n'étaient jamais venus mais qui doivent impérativement venir à Jazz à Juan. Le piano est sans doute l'instrument le plus populaire au sens noble du terme et c'est vrai qu'on ouvre le champ des publics quand on propose un pianiste, c'est pour cela qu'il était incontournable, surtout que les mélodies qu'ils proposent sont parfaitement accessibles à tout le monde.
Le 16 juillet, ça va être dancefloor avec Kool & The Gang !
Il ne reste que des places debout et de toute façon ceux qui ont pris des places assises seront debout au bout d'une minute trente ! Il faudra profiter de ce superbe moment. Et on se rend compte que s'il y a bien une musique transgénérationnelle, c'est bien le funk et toutes les tranches d'âge seront présentes pour partager cette superbe fête.
Le lendemain, ce sera aussi le cas avec Marcus Miller ?
Oui, il sera avec le Joshua Redman Group. C'est un plateau de musiciens autour de la cinquantaine avec un grand parcours et un grand avenir. Ce sont des vrais musiciens de jazz dans leurs histoires, qui ont su s'ouvrir aussi sur les autres musiques. A chaque fois que Marcus Miller est venu, c'était avec un nouveau projet qui mettait en avant d'autres horizons musicaux. Là, il vient en lui-même, jouer sur ses fondamentaux donc on va le retrouver, en quelque sorte. Il est resté 4-5 ans sans venir, c'est assez rare. C'est un pilier du festival et le public est ravi de le retrouver.
Propos recueillis par Benoit Thuret
Texte écrit par Grégory Curot