Et si le Montreux Jazz Festival était aussi le festival de la démesure, des caprices de stars et des meilleures anecdotes du jazz ?
Le festival de jazz de Montreux est une pépite dans le monde du jazz et de la musique en général. L’un des plus grands festivals de jazz mondiaux se glisse sagement dans une discrétion toute suisse le long du Lac Léman depuis 1967. Et on ne se lasse pas de lire et relire, d’écouter encore et encore les interviews de l’un de ses fondateurs et directeur historique, le regretté Claude Nobs, surnommé Funky Claude.
Claude Nobs s’est dit, dès la première édition, que pour réussir à attirer les grandes stars du jazz, loin des Etats-Unis et des grandes capitales européennes, il faudrait leur proposer quelque chose de différent, d’unique, d’incomparable. Fort d’une formation dans l’hôtellerie et dans le tourisme, il imagine que c’est en soignant l’accueil des artistes, en le personnalisant, en répondant aux moindre de leurs demandes, voire en les anticipant, qu’il fera venir et revenir les meilleurs musiciens du monde dans le canton vaudois.
La recette est toute trouvée et fonctionne à merveille. Claude Nobs est naturellement généreux et sincèrement passionné de musique depuis sa plus tendre enfance. Il réalise ses rêves en accueillant Miles Davis, Ella Fitzgerald, Quincy Jones, Prince, Marvin Gaye, Nina Simone à Montreux comme s’il les recevait à la maison. D’ailleurs beaucoup d’entre eux viendront dans son chalet pour prendre leur repas, plutôt que dans les restaurants. Claude Nobs est en cuisine.
Miles Davis était un habitué de Montreux. Claude Nobs l’a rencontré à Newport aux Etats-Unis, en 1964. Ce jour-là, il fait terriblement chaud, Claude Nobs portait une chemise brodée, achetée lors d’un voyage en Tunise. Lorsque Miles l’a vu arriver, il lui a lancé : "Nice shirt" ! Sympa la chemise ! Claude Nobs a alors déboutonné sa tunique et la lui a offerte sur le champ, continuant la conversation torse nu. Miles Davis sidéré, pris le vêtement et n’oubliera jamais ni le geste, ni la générosité légendaire de Claude Nobs. Ainsi, lorsqu’il donnait des concerts à Montreux, il exigeait que Claude Nobs vienne le chercher à l’aéroport, de préférence en Ferrari. Miles Davis avait une passion pour le luxe et les belles montres. Quelle meilleure destination que la Suisse pour se faire offrir un beau chronographe... Miles Davis réclamait à chaque fois que Claude Nobs lui fasse cadeau d’une belle pièce d’horlogerie, souvent sertie de diamants, sans quoi il ne monterait pas sur scène le soir.
Mais, c’est certainement grâce à cet accueil, à ces conditions exceptionnelles, que Prince offrit, pour sa première venue, en 2007, après un concert de 2h30, une jam session qu’aucun spectateur n’oubliera. Sur une scène gratuite.
Marvin Gaye, reçu comme un roi, finit par donner son accord pour que l’on filme son concert. Ce document reste une référence. Nina Simone accueillie comme une impératrice, jouera l’un de ses plus beaux lives à Montreux, même chose pour Quincy Jones, chez lui à Montreux, qui devint un temps, producteur du festival et pour toujours le grand ami de Claude Nobs.
La liste des anecdotes est infinie, comme la passion dans laquelle Claude Nobs, a trempé sa plume pendant 50 ans pour écrire l’un des plus beaux romans du jazz et de la musique live. Et cette belle histoire du Montreux Jazz festival continue avec sa nouvelle équipe, sous la direction de Mathieu Jaton.